A l’Initiative du Réseau Environnement Santé qui avait obtenu l’interdiction des phtalates et du bisphénol A dans les emballages alimentaires, plusieurs régions et communes de France ont signé un engagement pour devenir Villes et Territoires Sans Perturbateurs Endocriniens. La Région Ile de France, la région Occitanie Pyrénées/Méditerranée, le Département du Tarn, le Département de Haute Garonne, les villes de Paris, Bordeaux, Strasbourg, Toulouse, Grenoble, Limoges, Besançon, Béziers, Puteaux, Nanterre, Vandoeuvre-les-Nancy, Villepreux, le CAPSO une communauté d’agglomérations du Pas de Calais comprenant 53 communes… Quelques maternités accompagnent les femmes enceintes pour qu’elles évitent les contaminations de leur enfant in utero. Quelques cantines scolaires ont remplacé les plastiques pour réchauffer au micro-onde (le pire que l’on puisse faire) les aliments ou pour les servir à table… www.reseau-environnement-sante.fr/category/les-collectivites-locales-sengagent/
C’est une avancée très significative, mais cela ne concerne encore qu’une petite minorité de la France et des DOM TOM alors qu’il est vital que cela soit systématique.
C’est une avancée très significative, mais cela ne concerne encore qu’une petite minorité de la France et des DOM TOM alors qu’il est vital que cela soit systématique.
Je vous propose une série d’article sur les perturbateurs endocriniens et la santé (publié pour la première fois dans le DSN Le Grand Dérèglement, chez Santé Nature Innovation).
Tsunami chimiques au quotidien
Le printemps silencieux, l’alerte princeps
« Nous pulvérisons les ormes, et au printemps suivant nul merle n’y chante… parce que le poison a fait son chemin, pas à pas, de la feuille de l’orme au vers, puis du vers au merle » Rachel Carson
En 1951, Rachel Carlson, une biologiste du Bureau Américain de la Pêchespécialisée des milieux marins, rend hommage par trois livres à la fabuleuse biodiversité des mers.
11 ans plus tard, en 1962, c’est une sirène d’alarme qu’elle fait retentir : le mondialement célèbre Printemps silencieux, aujourd’hui considéré comme le livre fondateur du mouvement écologiste.
Que c’est-il passé ? A partir de 1957 l’USDA,l’INRA américain s’est mis à recommander des campagnes massives de pesticides, pour lutter en particulier contre une invasion de fourmis de feu. Quant au gouvernement fédéral, il lance, lui, la même année un programme national d’épandage aérien de DDT, un pesticide organochloré contre une mite (la mite du bohémien). Et, synchronicité, la même année encore, les récoltes de canneberge s’avèrent contaminées par un herbicide,l’aminotriazole, un carcinogène, entraînant un effondrement du marché pendant 3 années.
Ces pesticides issus des recherches militaires sur la guerre chimique alertent la société Audubon, de protection des oiseaux, qui commande à Rachel Carson une étude sur l’impact environnemental de ces pesticides.
Son enquête auprès des scientifiques met en avant que le DDT est reprotoxique, altérant la fertilité et carcinogène.
Par ailleurs, au delà des effets délétères directs de ces pesticides de synthèse, la destruction massive des insectes retentit de manière drastique sur la survie des oiseaux, dont il impacte en plus les capacités de reproduction.
Depuis des études ont montré que le DDT a affecté les capacités reproductives de nombreuses autres espèces, dont les batraciens, les poissons, les oiseaux pélagiques, les phoques et l’ours polaire.
Le livre de Rachel Carson connaît un retentissement mondial, mais il faudra attendre 8 ans pour aboutir à l’interdiction du DDT aux Etats-Unis grâce à la contribution d’autres acteurs venus à la rescousse.
Entre temps elle est violemment attaquée par les lobbys avec le concours d’une frange de scientifiques liés aux industries chimiques.
Mais Carol Yannacone assiste à la mort de poissons dans les mares de Yaphank suivant une pulvérisation de DDT menée par la commission de contrôle des moustiques du comté de Suffolk. Elle convainc son mari Victor Yannacone, un avocat, de les poursuivre en justice, ce qui mène à une interdiction locale d’utiliser le DDT.
Le scientifique Charles Wurster, professeur à l’Université de l’État de New York à Stony Brook, avait auparavant remarqué que l’utilisation du DDT sur les ormes tuait les oiseaux sans pour autant sauver les arbres.
Art Cooley, un instituteur de Bellport, constate entre-temps le déclin des balbuzardset autres grands oiseaux aux alentours de la rivière de Carman, et établit un lien avec l’utilisation du DDT.
En 1967, la famille Yannacone se joint à Wurster et Cooley pour former l’EDF (Environmental Defense Fund) et lancer une plus grande campagne contre l’utilisation du DDT qui mène à son interdiction aux États-Unis. Suite à cette dernière, les balbuzards et aigles, espèces alors considérées en danger, ont été sauvées de l’extinction.
Au cours des années 1970et 1980, l’usage du DDT pour l’agriculture est interdit dans la plupart des pays développés. Les premiers pays à interdire le DDT sont la Norvège et la Suède en 1970, la France en 1971…mais le Royaume-Unine l’interdira pas avant 1984.
Et il est encore utilisé dans de nombreux pays, dont le Maroc ou d’autres pays d’Afrique ou d’Amérique du Sud, notamment pour lutter contre le paludisme.
Le DDT est rémanentet dans l’environnement et dans l’organisme des années après été ingéré. C’est ce qu’on appelle un POP(« polluant organique persistant »). Suite à son interdiction dans beaucoup de pays – la convention de Stockholm, ratifiée le 22 mai 2001et effective depuis le 17 mai 2004, vise à interdire le DDT ainsi que d’autres polluants organiques persistants : celle-ci est signée par 158 pays et soutenue par la plupart des groupes environnementaux, -les taux ont baissé,mais chacun en reste porteur à ce jour, comme le montre une étude en France de l’Institut de Veille Sanitaire.
Le DDT et des centaines d’autres pesticides, dont le plus utilisé au monde, le glyphosate (Round Up), marketé par Monsanto comme biodégradable, qui vient d’être officiellement classé comme carcinogène probable alors qu’il est importé dans les végétaux OGM pour les élevages en Europe sans que cela soit seulement étiqueté, continuent à empoisonner le monde entier, plancton, poissons, animaux et humains, à cet instant même.
Selon une étude de l’Institut de Veille Sanitaire, qui se base sur des analyses urinaires, les niveaux français des pesticides organophosphorés(famille à laquelle appartient le DDT) et pyréthrinoïdes (famille à laquelle appartiennent les pesticides incriminés dans l’hécatombe des abeilles) sont supérieurs à ceux des Américains et Canadiens. Pas étonnant, la France est un des pays en tête du classement mondial dans l’usage des pesticides (et aussi des médicaments… une coïncidence ?).
www.invs.sante.fr/Espace-presse/Communiques-de-presse/2013/Exposition-de-la-population-francaise-aux-pesticides-et-PCB-NDL
A côté de cela de nombreux moustiques et autres cibles ont développé des résistances au DDT qui ne cessent de prendre de l’ampleur, en particulier en Afrique du Sud, en Arabie saoudite, au Bénin, au Burkina Faso, au Cameroun, en République centrafricaine, au Congo, en Éthiopie, au Ghana, à l’Île Maurice, au Liberia, au Mali, au Niger, au Nigeria, au Sénégal, au Soudan, au Swaziland, au Togo, à Zanzibar, au Zaïre.
Il apparaît évident qu’entre sa toxicité très élevée et son efficacité de plus en plus faible, il est urgent de trouver des alternatives dans les trop nombreux pays où on se résigne encore à l’employer, surtout contre les moustiques vecteurs du paludisme.
Car nous en restons tous victimes, baignés dans un cocktail de dizaines de milliers de toxiques.
L’histoire de Rachel Carson rappelle fortement celle de son contemporain, Clair Cameron Patterson, un géologue qui a réussi le premier a établir avec exactitude l’âge de la Terre en étudiant la conversion de l’uranium en plomb et qui découvre ce faisant les dangers du plomb pour la santé humaine : cardiotoxique, neurotoxique et carcinogène.
Il montre que les teneurs en plomb des corps humains ont été multipliés entre 700 et 1200 fois entre la période pré-colombienne et les temps modernes. Aujourd’hui le plomb est enregistré comme la 6ème cause de mortalité aux Etats-Unis.
A partir de 1965 il rend publiques ses conclusions, mais est agressivement contré par les industriels de la Ethyl Corporation,débouté par les tribunaux, exclu des institutions jusqu’à ce que, forcée par l’évidence, l’EPA, l’agence de l’environnement, mette en place une réduction par paliers du plomb dans l’essence sur 13 années, de 1973 à 1986.
On pense aussi au grand scientifique Henri Pézerat qui a connu en France le même type de combat contre un mur du silence – criminel puisque responsable rien que dans ce pays de plus de 100 000 décès par induction de cancers de la plèvre – autour de l’amiante.
A eux seuls, ces trois scientifiques lanceurs d’alerte, véritables héros des temps modernes, faisant au début face seuls aux intérêts court-termes des multinationales, ont fini par sauver des dizaines de millions de personnes de morts et de maladies précoces.
Les mêmes genres de combats continuent à ce jour, concernant bien d’autres toxiques qui ont envahi les moindres recoins du monde, sans que leur dangerosité n’ait jamais été évaluée avant leur mise en libre circulation.
Fort heureusement on enregistre sur le front de plus en plus de héros-lanceurs d’alerte. Certains se sont associés comme dans la Fondation des Sciences Citoyennes, le Réseau Environnement Santé, l’Association Santé Environnement France, Générations Futures…
Pour en savoir plus :
Rachel Carson, Printemps silencieux, préface d’Al Gore, Wildproject, 2009
www.unesco.org/new/fr/natural-sciences/ioc-oceans/about-us/special-events/the-legacy-of-rachel-carsons-silent-spring/
http://fr.wikipedia.org/wiki/Printemps_silencieux
http://fr.wikipedia.org/wiki/Dichlorodiphényltrichloroéthane
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