De nouveau, l’ensemble des conseils alimentaires et complémentaires donnés jusqu’à présent a des effets anti-adhésion et anti-aggrégant plaquettaires.
Il faut souligner l’importance des acides gras oméga 3, des antioxydants, polyphénols et du magnésium pour cette action anti-thrombotique.
S’ajoutent deux facteurs puissamment pro-thrombotiques : l’homocystéine et la Lp(a).
L’homocystéine a été découverte être un agent pro-agrégant plaquettaire dont l’élévation entraîne un risque fortement augmenté de phlébites, d’embolies pulmonaires, d’accidents vasculaires cérébraux et d’athérome, par un anatomopathologiste de Harvard, Kilmer Mc Cully, en 1969. J’ai eu la chance de le rencontrer lors du premier congrès international consacré à l’homocystéine au Château de Dromoland en Irlande. Il avait constaté qu’une grande proportion des personnes qu’il était chargé d’autopsier pour décès cardiaque n’avaient ni cholestérol élevé, ni hypertension, ni aucun des facteurs de risques pointés du doigt. Par contre des enfants porteurs d’une élévation génétique de l’homocystéine étaient atteints d’athérome précoce. Il injecte de l’homocystéine à des lapins chez qui l’on observe un épaississement très rapide des artères. A partir de là, il découvre que les vitamines B9, B12 et B6 peuvent faire baisser l’homocystéine circulante. Comme souvent, ce pionnier a parlé dans le désert pendant des dizaines d’années. Que venait faire cet intrus, même pas cardiologue avec son homocystéine ? Les obsédés du cholestérol traitent son idée de « non sens » et on lui coupe ses crédits. Il faut attendre plus de 20 ans pour que d’autres équipes retrouvent ses résultats et le sortent du purgatoire.
Il avait entre temps continué ses travaux avec de faibles moyens et montré que l’homocystéine outre son effet pro-thrombotique, stimule puissamment la prolifération des cellules musculaires lisses, ce qui entraîne le rapide épaississement des parois artérielles.
Mais malgré la reconnaissance internationale, il s’avère qu’il n’y a aucun bénéfice à faire pour Big Pharma sur l’homocystéine comme sur les statines, puisqu’il suffit de donner des vitamines B et de ce fait, la prise en compte de l’homocystéine en pratique médicale est restée extrêmement marginale. Les médecins ne demandent encore quasiment jamais son dosage !
Le fait que des milliers d’études aient été publiées ne semble pas être capable de changer les choses.
Par exemple l’étude European Concerted Action Project Homocysteine and Vascular Disease montre que quel que soit le niveau de lipides circulants, y compris du cholestérol HDL qui ne s’avère alors pas protecteur, une élévation de l’homocystéine augmente significativement les risques cardiovasculaires.
Daly C et al, Homocysteine increases the risk associated with hyperlipidaemia, Eur J Cardiovasc Prev Rehabil, 2009, 16 (2) : 150-5
La reprise de la fameuse cohorte de Framingham permet de montrer qu’une élévation de l’homocystéine est un facteur de risque de
– sténose des artères carotides
– mortalité cardiovasculaire
– accident vasculaire cérébral
– insuffisance cardiaque
– démences vasculaires et maladie d’Alzheimer
– fractures du col du fémur
– mortalité de toutes causes.
Selhub J et al, The many facets of hyperhomocysteinemia : studies from the Framingham cohorts, J Nutr, 2006,136 (6 Suppl) : 1726S-1730S
Une méta-analyse montre que pour chaque augmentation de 5 mcmol/l d’homocystéine, le risque d’accident cardiovasculaire augmente de 20%.
Humphrey LL et al, Homocysteine level and coronary heart disease incidence : a systematic review and meta-analysis, Mayo Clin Proc, 2008, 83 (11) : 1203-12
Comme l’élévation de l’homocystéine est révélateur d’un déficit en vitamines B9 et B12, elle est aussi associée à des risques augmentés de nombreuses autres pathologies : malformations du tube neural chez les enfants des mères affectées, dépression, tension pulsionnelle élevée, maladie d’Alzheimer et autres démences, cancer du colon, du col utérin, des bronches, leucémies… (nous avions expliqué l’importance de la méthylation dépendante de ces vitamines dans la newsletter Cancer, pourquoi on le développe).
En pratique, il est indispensable de faire doser dans son bilan l’homocystéine qui est plus importante que le cholestérol.
Si elle est en dessous de 10 mcmol/l pas de problème
Entre 10 et 15 les risques sont déjà fortement augmentés
Entre 15 et 20 les mesures devront être plus intenses
Au dessus de 20, il faut rechercher une cause génétique.
Les deux causes génétiques principales sont
* une méthyltétrathydrofolate réductase (MTHFR) déficiente dite « thermolabile » (15% de la population)
l* ’homocystéinurie hétérozygote (1% de la population).
Dans ce cas, la personne doit prendre la supplémentation en vitamines B9, B12 et B6 associée à du magnésium (sans lequel les vitamines B ne sont pas activées) à vie, avec une vérification annuelle du taux d’homocystéine et des mesures associées (conseils et compléments, centrés sur l’alimentation anti-inflammatoire, le curcuma, l’ail, les acides gras oméga trois, le magnésium, les antioxydants, les polyphénols).
S’il n’y a pas de cause génétique (dans ce cas l’homocystéine ne peut quasiment pas dépasser 20), la prise de vitamines B peut se faire en une cure d’un mois, relayé par les conseils alimentaires et un complément généraliste sans fer ni cuivre.
Le complexe correcteur doit comprendre au moins 1mg de vitamine B9, 500 mcg de vitamine B12 (si la personne est âgée l’absorption étant moins bonne on peut avoir à recourir soit à une forme sublinguale, soit à des injections intramusculaires), 50 mg de vitamine B6… autant en profiter pour mettre les autres vitamines B (B Complex 100, Solgar). Toujours associer du magnésium, sans quoi les vitamines B ne sont pas forcément activées (D Stress Booster 1 stick mati, midi et soir, qu’il serait judicieux de poursuivre).
Les autres mesures pour se protéger des risques cardiovasculaires associés à une homocystéine élevée (de nouveau, ceci quel que soit son niveau de cholestérol) :
– remplacer le tabac par de « bonnes drogues » (il élève aussi l’homocystéine en détruisant les vitamines B et la rend plus toxique en l’oxydant) :
– substituter au café le thé, mieux le thé vert qui est protecteur, alors que le café bloque l’absorption des vitamines B, augmente l’excrétion urinaire du magnésium et fait monter l’homocystéine ;
– injecter du mouvement dans son quotidien, la sédentarité étant aussi associée à une montée de l’homocystéine (on constate l’intrication de tous ces facteurs, mais heureusement, on retrouve pratiquement toujours les mêmes « méchants » et les mêmes « bons ») ;
– la ménopause est associée avec une montée de l’homocystéine ainsi que l’âge dans les 2 sexes, les vitamines B9 et B12 étant de moins en bien absorbées avec l’âge ;
– attention, les régimes végétariens, et pire végétaliens, s’ils présentent d’énormes avantages amènent si l’on ne prend pas des mesures appropriées à des déficits en vitamine B12 entraînant de fortes élévations de l’homocystéine et un mauvais rapport oméga 6/oméga 3.
Les végétariens, et encore plus les végétaliens, doivent prendre un complément généraliste contenant de la vitamine B12 et veiller à augmenter leurs apports en oméga 3 (huiles colza, lin, caméline, chanvre, graines de lin broyées, éventuellement compléments de micro-algues, les poissons étant de plus en plus problématiques).
Koebnick C et al, Long-term consumption of a raw food diet is associated with favorable serum LDL cholesterol and triglycerides but also with elevated plasma homocysteine and low serum HDL cholesterol in humans, J Nutr, 2005, 135 (10) : 2372-8
A noter que l’homocystéine oxydée étant encore plus toxique que l’homocystéine non oxydée, les antioxydants et polyphénols, ainsi que l’assainissement de l’environnement et la maîtrise des excès de fer complètent ces mesures.
Un autre facteur, lui strictement génétique est une Lp(a) élevée, un dosage qui lui aussi devrait être systématiquement inclus dans le bilan des analyses biologiques, mais contrairement à l’homocystéine une fois suffit.
Que fait cette Lp(a) ?
Lorsque les plaquettes se collent aux parois artérielles et forment un paquet ficelé par de la fibrine, un service de nettoyage appelé fibrinolyse passe. La Lp(a) fait obstruction à la fibrinolyse. Le résultat ? Le même que lorsque l’homocystéine, même si les mécanismes n’ont rien à voir : risques de phlébites, d’embolies, d’accidents vasculaires et d’athérome, puisque chaque microlésion des parois artérielles active les plaquettes qui se collent aux parois.
Et l’on peut très bien avoir et une homocystéine élevée et une Lp(a) élevée.
Des jeunes filles sous pilule font des accidents vasculaires cérébraux à 20 ans, des femmes enceintes des embolies, des hommes et des femmes des accidents cardiovasculaires précoces pou une raison majeure : sous l’empire du « cholestérol délirium » on se contente de faire doser le cholestérol et on ne fait quasiment doser l’homocystéine et la Lp(a).
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20130326.OBS3037/la-pilule-provoque-2-500-accidents-et-20-deces-par-an.html
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20130114.OBS5349/pourquoi-il-faut-jeter-sa-pilule-de-derniere-generation.html
Que faire quand sa Lp(a) est élevée ?
Une fois de plus, tous les conseils déjà donnés contribuent à réduire les conséquences, en particulier une alimentation anti-inflammatoire, les acides gras oméga 3, les polyphénols, les antioxydants, le magnésium, et surtout l’ail.
En effet l’ail est, entre autres, un puissant fibrinolytique, y compris chez les patients atteints de pathologies coronariennes.
Bordia A et al, Effect of garlic (Allium sativum) on blood lipids, blood sugar, fibrinogen and fibrinolytic activity in patients with coronary artery disease, Prostaglandins Leukot Essent Fatty Acids, 1998, 58 (4): 257-63
De plus les études objectivent des effets positifs sur le profil lipidique, réducteurs de l’oxydation du cholestérol LDL, modulateurs de la toxicité de l’homocystéine, améliorateurs de la production de NO – vasodilatateur – par les parois artérielles, anti-hypertenseurs, anti-aggrégants plaquettaires, anti-athérogènes et neuroprotecteurs.
Mathew B et al, Neuroprotective effects of garlic a review, Libyan J Med, 2008, 3 (1) : 23-33
Lau BH et al, Suppression of LDL oxidation by garlic compounds is a possible mechanism of cardiovascular health benefit,
J Nutr, 2006, 136 (3 Suppl) : 765S-768S
Weiss N et al, Aged garlic extract improves homocysteine-induced endothelial dysfunction in macro- and microcirculation, J Nutr, 2006, 136 (3 Suppl) : 750S-754S
Rahman K et al, Garlic and cardiovascular disease : a critical review, J Nutr, 2006, 136 (3 Suppl) : 736S-740S
L’addition d’ail dans ses plats – qui doit rester cru – est plus facile sous forme d’ail mariné (plus digeste et sans effets sur l’haleine).
Sinon il existe des capsules d’ail désodorisé.
Il existe par ailleurs une solution plus radicale. Celle de prendre de l’acide nicotinique, une autre forme de vitamine B3 que le nicotinamide (vitamine PP). Celui ci est non seulement le seul produit que l’on connaisse, capable de faire baisser drastiquement la Lp(a), mais aussi triglycérides et cholestérol et d’avoir un effet vasodilatateur.
Et il est reconnu comme le principe actif le plus puissant pour élever le cholestérol HDL.
Cziraky MJ et al, Targeting low HDL-cholesterol to decrease residual cardiovascular risk in the managed care setting,J Manag Care Pharm, 2008, 14 (8 Suppl) : S3-28.
L’étude Coronary Drug Project menée entre 1966 et 1975 a testé l’acide nicotinique sur 8 341 hommes âgés de 30 à 64 ans ayant déjà fait un infarctus contre clofibrate, oestrogènes et de la dextrothyroxine. Ces deux derniers ont du être arrêtés car ils augmentaient la mortalité. Le fibrate n’a eu aucun effet significatif.
Seul l’acide nicotinique a réduit significativement les récidives d’infarctus et a avec un recul de 15 ans, réduit la mortalité de toutes causes de 11%.
Paul L Canner et al, Fifteen year mortality in Coronary Drug Project patients : long-term benefit with niacin, J Am Coll Cardiol, 1986, 8 (6) : 1245-1255.
En pratique : on réserve l’utilisation de l’acide nicotinique aux cas où toutes les autres mesures ne marchent pas, lors d’angine de poitrine non contrôlée, d’artérite… car son maniement est délicat. Il stimule la sécrétion d’histamine par la paroi gastrique et chez certaines personnes cela peut donner des « flush » : rougeur, chaleur, parfois hypotension. C’est sans gravité, mais cela peut être désagréable.
On peut réduire ces effets secondaires par des formes retard : hexanicotinate d’inositol, la montée progressive des doses, l’ingestion toujours sur estomac plein, la prise associée de magnésium, de vitamine C et de polyphénols.
L’acide nicotinique est contre-indiqué dans les gastrites, les ulcères gastro-duodénaux, les intolérances alimentaires, les hépatopathies.
Il peut perturber les enzymes hépatiques et la tolérance au glucose.
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